Chienne de Marie-Pier Lafontaine
Dans Chienne, Marie Pier Lafontaine condamne l’enfance meurtrie en
clamant l’horreur avec rudesse et flamboyance. Les mots heurtent, empoignent et
déchirent le lecteur. L’autrice hurle la rage contenue pendant ces années de
silence écrabouillé par son géniteur, avec la complicité de sa mère. Elle conte
le drame de ces enfants martyrs nés dans des familles tyranniques échappant à
tous les radars de protection et qui doivent se construire malgré les
humiliations, les tortures, le sadisme comme modèle de parentalité. Les mots
claquent et empoignent. Les mots enjoignent les actes à rétrécir, ils aident à
refaire surface.
Nos sociétés sont peuplées de
bourreaux. Ce n’est pas parce qu’on ne les décèle pas qu’ils n’existent pas. Ce
n’est pas parce qu’on ne les imagine pas qu’ils ne se modélisent pas. Ils
peuvent d’ailleurs apparaître chez monsieur tout le monde. Le père soumet ses
enfants en les en avilissants. La mère victime elle aussi, ne trouve pas le
courage de protéger, elle va même plus loin, elle livre ses filles en échange d’un
peu de paix, pour elle, pour elle seule.
Comment peut-on laisser ses
enfants en proie à l’agonie ? Comment peut-on œuvrer avec autant d’acharnement
pour détruire un être, qui plus est lorsque c’est son enfant ? Ces
questionnements me soulèvent depuis toujours. Je comprends la maltraitance éducative
ordinaire (même si je ne l’excuse pas) et je tente de la soustraire (je
travaille en protection de l’enfance). Mais la cruauté psychopathique n’a pas
de limite et n’est pas solutionnable, pour autant on la traite parfois de la même
façon. Même en protection de l’enfance, on en rencontre peu de ces familles-là,
sans filets, sans âme. Sont- elles bien cachées ?
J’espère toujours secrètement qu’elles ne se soustraient pas seulement aux
regards.
Je suis admirative de la
résilience de l’autrice, qui sublime par l’écrit cette dégradation, cette
offense à sa construction identitaire.
Ce récit est implacable et d’une grande force littéraire. Il est utile, subtile et sans apitoiement.
Le nouvel Attila, le 4 septembre 2020 (première sortie au Canada en 2019) 128 pages
Outch, comme ça a l'air fort !!! Merci pour ta participation à mon bilan des coups de <3.
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