La tête et le cou de Maureen Demidoff



Ce document est instructif historiquement et socialement. Il balaye plusieurs domaines de la vie en Russie sur plusieurs époques. Il est riche en informations à condition de prendre du recul et de se positionner à distance de ce qu’on y lit, afin de rester objective dans sa compréhension ; et ainsi, de ne pas risquer de tomber dans les clichés qu’il peut malgré lui véhiculer.

Le titre reste vague et ne se pose pas comme porteur de vérité absolue sur la vie de toutes les femmes russes, ce qui est plutôt judicieux au vu des témoignages pétris de jugements et parfois de manque d’ouvertures à l’autre que l’on peut y lire.

Ces femmes parfois en complète contradiction sur leurs aspirations nous touchent tout autant qu’elles nous crispent.

Ces témoignages nous éclairent sur le déterminisme social que la propagande et la fermeture sur le reste du monde peuvent entraîner encore aujourd’hui.

Lors de la lecture, il ressort qu’un nombre important de familles préfèrent manquer de liberté et voir leurs droits bafoués à condition d’avoir la sensation de vivre correctement. Le collectif pourtant si valorisé est finalement relayé au second plan lorsqu’il s’agit pour chacun de tirer son épingle du jeu. Peu importe les autres et les injustices, si moi, je survis !

Le petit éclairage de fin écrit par Hélène Yvert-Jalu même si nécessaire parait peu suffisant. Il reste beaucoup de questionnement et une sensation peut être d’inaboutissement lors de l’achèvement de la lecture.

Ces femmes tristes et raisonnables nous entraînent dans la morosité et semblent avoir peu d’espoir pour imaginer un avenir plus joyeux. Leurs vies laissent peu de place à l’envie et à la passion. Malgré le recul du droit des femmes et/ou le peu d’avancé,  la mobilisation autour de cette question ne semblent pas beaucoup les intéresser ; ce qui est peu réjouissant pour les générations futures. 

Les femmes utilisent le « nous » systématique pour évoquer le peuple russe et nie de fait leurs individualités et différences. Il s’avère pourtant (fort heureusement) que leurs pensées ne sont jamais complètement uniformes bien que selon les générations elles se rassemblent tout autant qu’elles se ressemblent.
Reste l’espoir que l’uniformisation et la propagande soit combattu et que « les prochaines » femmes russes soient des citoyennes du monde tout autant que des citoyennes russes.

Edition des Syrtes, 24 Aout 2017
215 pages

Lecture via le Prix des lectrices Elle 2018

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