Raisons obscures d'Amélie Antoine
Un roman à l’allure documentaire,
une description pas à pas des pensées des protagonistes et de leurs
agissements. Un tempo régulier jusqu’à l’aboutissement déchirant, désolant.
Une analyse fine et sans
concession des mécanismes du harcèlement. Sa construction insidieuse, sa
violence pour la victime mais aussi pour l’auteur. Sa création sociétale qui
assigne chacun à une place sans réelle possible modification.
La cruauté comme seul l’humain en
est doté, le désespoir, le cycle sans fin.
C’est histoire de deux familles
plutôt ordinaires perdues dans leurs quotidien, engoncées chacune dans leurs
blessures et incapable de percevoir suffisamment l’autre et ces souffrances.
C’est l’histoire ordinaire de deux familles qui passent à côté de leurs enfants.
C’est l’histoire de deux familles ordinaires qui autocentré sur leurs propres
difficulté vont tout perdre, jusqu’au vide et l’incompréhension, sans
impossible retour.
C’est un texte porteur d’un
message fort pour qui souhaitera l’interpréter, un texte comme un manifeste.
Car le partage, la solidarité
et l’empathie devrait être une priorité
des apprentissages dès l’enfance pour construire la bonté d’âme. Chaque acte
malveillant devrait être repris, expliqué, réprimé. Les violences intolérables
et in tolérés. A quoi bon être brillant si l’on est malveillant. L’école
doit être un lieu d’exemplarité, l’adulte ne peut ni ne doit rien laisser
passer. Cela doit être une priorité. Et la protection de l’enfance ne doit
jamais être secondaire pour éviter les reproductions.
Il est nécessaire d’apprendre à
l’enfant et l’adolescent à être vivant autrement qu’en s’en prenant à plus
faible, plus vulnérable. Comment pouvons-nous espérer une société plus juste
plus attentive aux inégalités quand dans les deux espaces de vie et de
construction des enfants (l’école et la maison) la violence est tolérée voir
pratiquée par l’adulte ?
Il faut sensibiliser, observer et
éduquer nos enfants à l’empathie et à la bienveillance parce que l’école et à
fortiori le collège est le lieu de toutes les malveillances, de tous les
combats même les plus rude, même les plus avilissants. Parce qu’il faut
trembler à l’idée que nos enfants soit d’un côté comme de l’autre, parce
qu’écraser l’autre n’a jamais rendu meilleur. Parce que cela perdure bien après
l’école, dans toutes les strates de la
société (un exemple criant que cette ligue du LOL) dans tous les emplois, les
familles. Parce que chaque être compte. Parce que personne ne peut ni ne doit
souhaiter être une Sarah ou une Orlane.
Parce qu’il est intolérable que
des adultes restent passif ou détourne le regard. Parce que les adolescents se
cherchent, se construisent mais les adultes n’ont aucune excuse face à leur
inaction. Parce que chacun doit agir face à ce fléau malveillant et destructeur
qu’est le harcèlement. Cette violence entraînant parfois jusqu’à l’annihilement
complet de l’autre, jusqu’à ne plus le considérer comme alter ego, ne plus le
considérer comme vivant parfois jusqu’au drame absolu insoluble et
irréversible.
Parce que non, cela n’arrive pas
qu’aux autres !
Il est de ces romans qui
atteignent pour mieux pousser à la réflexion, celui-ci en est un. La plume ne
m’a pas particulièrement séduite mais elle est efficace et l’objet en est
essentiel.
XO Editions, le 7 mars 2019
384 pages
Autour de cette lecture :
Un film : Très réaliste et percutant : Le jour où j’ai brulé mon cœur de Christophe
Lamotte, 2018
Une série, glaçante, mais efficace et très
juste : 13 Reasons Why de Brian
Yorkey, 2017
Un document : Concis, précis, accessible et
astucieux : Te laisse pas faire ! : Aider son enfant face au harcèlement à
l'école d’Emmanuelle Piquet
Du côté de la Jeunesse :
Tyranno le terrible
d’Hans Wilhelm, 1992
Rouge de Jan De
Kinder, 2015
Commentaires
Enregistrer un commentaire