Une saison de coton, trois familles de métayers de James Agee avec les photographies de Walker Evans
Une saison de coton est une étude
minutieuse et précise de l’ampleur d’une vie à cette époque, à cet endroit,
dans une famille blanche et pauvre en Amérique. Elle fut initié en 1936 par le
magazine Fortune qui avait missionné
ses auteurs. James Agee et Walker Evans se rendaient en Alabama pour y
effectuer un reportage sur le métayage du coton.
Cet ouvrage est un bouleversement
indispensable porté par des réflexions très contemporaines malgré les années
décrites et photographiées. La misère y est campée sans pathos. Les faits sont
là, sans fioritures malsaines, on y lit la survit, on y voit la résignation.
C’est une dénonciation presque
imperceptible de ce que les « bons gens », ceux justement lisant le
magazine Fortune, ne veulent pas
savoir, ne pas imaginer, préfèrent mettre de côté. En ce sens, le monde a-t-il vraiment
changé ? Les médias ont rendu plus visible les tristesses et les joies
possibles peut-être, mais ils les ont aussi noyés dans la masse. Misère,
guerre, brutalité, inhumanité la liste est longue des excavations de notre
monde… Tellement d’images, de voix que la distance est grande et naturelle à s’installer
et qu’elle ne nous soumet plus beaucoup à la regarder de front.
Ce livre a été édité il y a
quelques années seulement, il était resté à l’état brut. L’immersion de
l’auteur dans ces familles et le texte inspirant et engagé qui avait émergé
n’avait pas trouvé preneur, le magazine Fortune
l’ayant certainement trouvé trop dérangeant. Ce journalisme documentaire serait
certainement associé à du voyeurisme à notre époque mais il est né à une
période où la visibilité de tous ces autres existait grâce à ces auteurs et photographes. Le photographe
Walker Evans n’est plus a présenté, la présence de ses photos rend l’ensemble
très émouvant et encore plus éloquent.
Des propos, tellement actuels, qu’ils
en sont usants et désolants.
Christian Bourgois, le 11 septembre 2014
187 pages
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