Laura d'Eric Chauvier
Elle a douze ans. Se seins et ses fesses sont formés.
Elle se maquille de façon outrageante. Je la regarde, scrute le moindre de ses
gestes et pressens que le choix de quitter l’enfance n’en ai pas vraiment un.
Mais ce constat m’encombre : qui intéresse-t-il ? Les adultes à qui
je ne peux rien dire sur ce sujet ? Mes camarades
« duvets-jurons-masturbations » ? Dans la moiteur glauque de la
cour du collège, je comprends que je quitterais le bled dès que possible.
Le bled c’est l’endroit lointain
et rural ou a grandi le narrateur. Le
bled, ou il retrouve la belle Laura pour laquelle il se pâme de désir depuis
l’adolescence. Entre rejet et affection il tente de comprendre l’attirance
irrésistible qui le pousse à traîner dans cette voiture 25 ans après, alors
qu’il a une famille qui l’attend. Laura si éloignée de son monde, ses codes
sociaux, moraux, langagier que s’en est incompréhensible pour lui.
Pourtant il est là, et c’est ce
huit clos que l’on suit dans ce court récit. L’auteur décortique et joue avec les
mots. Il nous interroge sur l’essence du langage. Que veut dire parler le même
langage ? A quel point le langage nous catégorise, nous range dans des
cases scellées, étiquette nos pensées ?
A travers le regard distancié de
l’anthropologue et celui en adoration du jeune pré-pubère, l’auteur nous livre
une satyre étonnante sur l’opposition des multiples mondes qui compose notre
société et qui souvent ne font que se croiser, sans se voir ni s’entendre
réellement et qui parfois même se déchire lors de frottement. Un roman
énigmatique sur la puissance de l’adolescence et son déterminisme existentiel.
Un ensemble plutôt contemplatif et lent. Beaucoup de bruit pour peu d’action
qui me laisse une appréciation de lecture en demi-teinte.
Allia, 2 janvier 2020
144 pages
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