La mère morte de Blandine de Caunes
J’avais très envie de découvrir
ce récit. Benoîte Groult est une figure féministe importante pour les femmes
sur plusieurs générations, je partage ses valeurs et j’adhère à la majorité de
ses combats. J’étais donc impatiente de la découvrir à travers sa fille. Même
si le sujet ne parait pas très heureux et vivifiant, il m’intéresse grandement.
Je suis restée un peu interloquée et désenchantée de son traitement par
Blandine de Caunes. Ce sujet est
touchant mais je n’ai pas réussi à m’identifier à sa peine. La forme du récit distancie l’auteur comme le
lecteur de ces sujets, pourtant universels, et c’est bien dommage !
Au bout de quelques chapitres, un
agacement pointe, en effet on y lit une démonstration permanente de la place de
l’autrice et sa famille dans la société privilégiée, les citations de
personnalités connus s’accumulent parfois sans aucunes plus-valus (mon ami
untel, mon amie unetelle). Cela donne un côté people au propos qui n’a pas
forcément de sens. Un étalage un peu crispant et questionnant : est-ce une
façon de se valoriser ou une simple habitude ? J’aurais presque plus
d’indulgence envers la valorisation qui
dénote d’une certaine vulnérabilité que de ce qui pourrait passer pour une
absence presque d’humilité. Evidemment
qui s’est un peu intéressé aux écrits de Benoîte Groult sait qu’elle fait
partie de l’élite sociétale et que par rayonnement sa famille également. Mais autant je
m’intéresse au processus de création et donc (puisque toute œuvre découle de
l’existence ), à la vie de l’auteur, autant je suis absolument indifférente à un entourage bourgeois et ou
intellectuel s’il n’apporte rien de plus au propos. J’ai d’ailleurs préféré les citations d’amis anonymes qui me semblait plus vivants et chaleureux.
J’ai aimé les propos sur la filiation, la maternité et le rapport intergénérationnel. L’impact qu’il a dans nos quotidiens et dans notre construction identitaire, mais je trouvais parfois le récit trop descriptif et un peu convenu.
La deuxième partie débute de
façon moins cérébrale, plus vivante, plus émouvante. Elle dit la douleur, mais
malheureusement, l’autrice continue également sa fresque des personnalités qui
sont amis, connaissances et soutiens et c’est excessif.
Certains détails frisent
l’indécence, (pourquoi préciser : j’étais à un déjeuner chez Armani le jour où
j’ai appris les attentats de Charlie Hebdo,
pourquoi ne pas juste dire j’étais en plein déjeuner lorsque ma fille
m’a appeler pour m’annoncer les attentats ?)
Certains propos sont clairement
idéaliste et dénote une mauvaise connaissance de la vie réelle d’une femme dans
ce pays, expliquer : je préférais payer
une jeune fille pour me seconder comme maman l’avait fait malgré son petit
salaire, est ahurissant. Qu’est-ce qu’un petit salaire ? A ne vivre qu’entouré
de privilégié on se sait pas ce qu’est la vie ordinaire. Avec un petit salaire
parfois, on ne mange même pas, on compte chaque centime, alors avec un petit
salaire, non on ne se paye pas de nurse à domicile, et on n’a pas non plus de
quoi accueillir de jeune fille au pairs…
Certains propos sont
condescendants, écrire la mort d’un raté est triste mais pas révoltante, est presque
aberrant venant de quelqu’un vivant cette vie-là. Qu’est-ce qu’un raté ? Il est
facile de ne pas l’être, de rebondir quand on vient de ce milieu qui ne
souffrira jamais complètement la misère, parce que justement, les relations
effacent tout, permettent tout. Elles ne devraient cependant pas permettre
n’importe quels propos.
Cette accumulation de
commentaires souffrant un milieu de vie particulier dénature l’objectif a
priori fixé, celui décrit sur la quatrième de couverture, à savoir, le deuil,
l’accompagnement d’une mère en fin de vie, la difficulté de survivre à ses
enfants, de concilier vie individuel et poids familial contraignant.
Finalement, le mysticisme des
derniers chapitres à fini d’achever les réserves que j’émettais encore, je n’y
suis pas du tout réceptive. Même si je ne doute pas que la foi soit génératrice
de mieux être, la pragmatique en moi aurait préféré plus de sentiments et moins
de croyances !
Un sujet qui avait tout le
potentiel pour me convaincre mais un récit globalement décevant. Un style
d’écriture agréable mais certains propos grandement générateur d’antipathie
pour moi.
Stock, 2 janvier 2020
220 pages
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