La dernière fois que j'ai vu Adèle d'Astrid Eliard
Antoine est parti. Elle n’a pas pu lui
dire ce qui la terrifie, elle, et rend ses journées si longues et ses nuits
poreuses à la folie, cette pensée qu’Adèle est peut-être partie parce qu’elle
était malheureuse, se sentait abandonnée… mal aimée ? Marion sait qu’il ne
suffit pas d’aimer, et qu’on peut aimer mal, c’est souvent ce qui se passe
d’ailleurs, on aime égoïstement, méchamment, violemment, on aime avec
négligence ou avec trop de zèle, on aime avec ce qu’on a, des cris, de la
tristesse, de la peur, des angoisses, parfois c’est de la joie et alors tant
mieux, toujours est-il qu’on croit aimer bien et qu’on ne se rend pas compte du
mal que l’on fait… Et si elle avait mal aimé Adèle ? Et qu’elle l’avait
fuie, elle, la mère coupable ? Depuis trois jours, elle retourne la purée
de pois qui emplit son crâne pour trouver quelle faute elle a pu commettre. Car
c’est sûr, elle a commis une faute.
C’est l’histoire d’une famille
ordinaire, une séparation qui délite, l’adolescence qui oppose, des changements
imperceptibles dans un quotidien usant. Une perte d’unité avec l’enfance qui
s’envole et la souffrance qui ne se dit plus, qui ne lie plus. L’histoire d’une
mère qui découvre que sa fille est une inconnue et a choisi une voie
incendiaire, intolérable et destructrice. L’incompréhension de ceux qui côtoie
sans connaitre, sans entendre, sans comprendre. Une voie, un geste qui modifie
plusieurs vies et génère du désespoir.
Adèle est tiraillée depuis
l’enfance entre un sentiment cuisant d’injustice et une envie de vengeance.
Elle rencontre un homme et avec lui épouse une cause qu’elle pense être
solidaire alors qu’elle est suicidaire.
Adèle est une jeune fille comme
il y en a tant, en manque de repère, à
la recherche d’une voix et qui trouve malheureusement celle qui l’emportera
vers les ténèbres.
Sa mère cherche l’endroit où le
manque s’est créer et ou le dialogue n’a plus existé. Elle se sent coupable,
elle regrette, cherche résilience mais sombre d’impuissance.
Ce roman s’ébat dans les sujets
du moment mais il le fait avec efficacité car on referme le livre avec la
crainte au fond de soi, que peut être un jour, nous non plus on ne voit pas !
Mercure de France, le 22 août 2019
224 pages
Quelques proposition autour de cette lecture :
Films :
L’adieu à la nuit d’André Téchiné (2019)
Le ciel attendra de Marie-Castille Mention-Schaar (2016)
Romans :
Khalil de
Yasmina Kadra
Grand frère
de Mahir Guven
Tu seras si jolie de Pierre Rehov
Site d’information autour de la radicalisation :
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